★★★½☆
CUCKOO
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TILMAN SINGER
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Je vous partage l’analyse du film très sympa de Ecran Large

Par Kevin Kozh n’air
Note globale : 3,5/5
J’ai été intrigué par ce thriller horrifique aux allures de Shining. Ne serait-ce que par son casting, on y retrouve Hunter Schafer qui commence à trouver sa voie dans le cinéma après Euphoria (Hunger Games, Kind of Kindness, et dans le prochainement dans le dernier film de David Lowery), et Dan Stevens, que je suis très heureux de redécouvrir depuis Légion. Dans cet article de Ecran large, on y apprend que le rôle de Herr Konig devait être initialement attribué à John Malkovich, mais cela n’a pas pu se faire pour des raisons de calendrier. Ça aurait donné une tout autre allure au film ! Mais la prestation de Dan Stevens est parfaite, le rôle de ce chef hôtelier décontracté et louche, bizarrement intrusif, lui va comme un gant. D’ailleurs, Herr Konig ressemble un petit peu à Erlkönig, qui est le titre original du Roi des Aulnes de Goethe, coïncidence ? 🤔
On y suit les aventures de Gretchen, entraînée contre son gré avec son père et leur nouvelle famille reconstituée dans un complexe hôtelier en haute montagne. Les décors forestiers en milieux alpin nous plongent d’emblée dans une bulle hors du temps, où de petites dingueries tapies dans l’ombre des sapins nous attendent ! L’ambiance est un peu trop ensoleillée, un peu trop verte, Herr Konig, propriétaire de l’hôtel et nouveau boss de son père est un peu trop chaleureux avec Gretchen pour que tout cela respire la quiétude et la félicité. Notre héroïne, mal à l’aise avec son nouvel environnement, tout comme avec sa nouvelle famille, se réfugie dans une bulle musicale, une playlist new wave des 80s qui parsème l’ensemble du film et souligne son besoin d’évasion, comme vers un autre temps, tout en donnant beaucoup de style à certaines séquences. J’ai notamment apprécié la scène où elle joue un morceau de basse bien lourd et qu’elle partage son univers musical avec sa petite demie sœur muette, cet approche par l’art était d’autant plus touchante qu’elles ont des difficultés à créer du lien.
Quoi qu’il en soit, le film réussit à installer un petit malaise imperceptible tout en présentant ses personnages. Gretchen s’est faite offrir un petit job d’été par Herr Kronig, comme standardiste dans l’hôtel Creepy. La déco ultra kitch et la ribambelle de personnages bizarres qu’elle va rencontrer nous rappelle Twin Peaks et accentue ce malaise. Le film fait plusieurs références vraiment pertinentes à l’univers de Lynch, j’y reviendrai tout à l’heure avec une scène horrifique qui fonctionnait très bien. Le moment de bascule se passe dans cet hotel, alors que Gretchen est plus méfiante que jamais envers Herr Kroning dont elle ressent pleinement la volonté étrange de se rapprocher d’elle et l’ascendant qu’il a sur son père, celle-ci se retrouve tard le soir à faire toute seule la fermeture de l’hôtel. Lorsque Herr Kronig l’apprend, il lui intime l’ordre de l’attendre à l’hôtel et de ne surtout pas partir toute seule dehors. Mais celle-ci préférait se couper un doigt plutôt que de rentrer en tête à tête avec son boss alors elle prend son petit vélo et se chauffe pour une balade nocturne.
L’effet fonctionne à merveille, entendre la voix de l’hôtelier en proie à la panique, lui habituellement d’un calme suspect, crée un vrai sentiment de danger pour nous, spectateurs.
La scène suivante est un pur moment d’épouvante qui nous évoque d’emblée Lost Highway, de Lynch encore une fois. Alors qu’elle écoute une musique avec son casque (qui d’ailleurs est très cool, je vous la met en lien à côté) on aperçoit au loin une silhouette de femme qui court dans la nuit. Gretchen avance tranquilou sur la route éclairée par la lune, et tout à un coup, l’ombre d’une personne courant juste derrière elle s’ajoute à la sienne. Gretchen se retourne, et là, BOOM : Audrey Hepbrun dans Breakfast at tiffany’s, mais avec un petit truc en plus…

On retrouvera cette créature, mi femme mi coucou, à la bouche tordue, trench beige et lunette noir; dans une séquence assez étrange dans des bungalows. Alors que Gretchen, aidée par un détective chelou tombé de nul part, tente de traquer cette créature, celle-ci part à l’assaut d’un couple. On voit plusieurs fois la séquence se répéter car les vibrations des cordes vocales de la créature permettent de remonter le temps. J’ai été un peu dubitative avec ce palier franchi dans le fantastique. Alors certes ça rajoute un peu de mystère, mais cela créait un effet visuel et narratif bizarre, d’autant plus que lorsqu’on découvre le twist final, cela apportait peu de chose, y compris dans les scènes d’actions.
Je vais spoiler un peu plus dans cette dernière partie : on y apprend notamment que la créature coucou est en fait une expérience à laquelle se livre Herr Kronig pour faire évoluer l’espèce humaine. Et comment on le découvre ? Dans une scène nulle à chier où le méchant nous dévoile son plan machiavélique, c’était dans un message micro destiné à Gretchen, mais le 4e mur ne survivra malheureusement pas.
Et ce n’est pas tout, on y apprend la particularité des coucous, pondre leurs œufs dans le panier des autres, afin que ceux-ci soient nourris par d’autres oiseaux, et que la petite sœur de Gretchen, est en réalité la fille de la créature qui n’a plus qu’un but : récupérer son petit oisillon. Alors que le détective privé et Herr Kronig se dégomment au fusil à pompe (ah et il a tué toute son équipe… Il y a t-il un scénariste dans l’avion ?!), Gretchen parvient à établir un lien de confiance et communication tacite avec sa sœur pour tenter de la sortir de ce guêpier. Il y aura un dernier affrontement dans une salle d’archive, rien de bien original (toutes les étagères qui tombent comme des dominos) mais globalement ça fonctionne bien. Les deux sœurs s’en sortent saines et sauves et savourent enfin pleinement le nouveau lien qui les unis. Elles sont prises de pitié face à la créature oiseau qui finit par mourir, et Herr Kronig se fait lui aussi tué à son tour, on est sur de l’happy end.
Bilan du film : c’était bien ! mais un petit peu dommage. Je trouve que l’atmosphère et la lenteur du début étaient très réussies, puis peu à peu, quand le fantastique entre en scène (et malgré une entrée très chanmé), le réalisateur introduit plusieurs concepts voire plusieurs séquences de façon maladroite. L’étrange, contrairement à l’univers de David Lynch, ne semble pas toujours maîtrisé, parfois même pompeux et inutile. Je repense à ses séquences de retour dans le temps de quelques secondes qui s’enchaînent, ce qui crée un effet vraiment bizarre (et involontaire) au niveau du rythme. On a également cette séquence où Herr Kronig dévoile son plan dans une piscine vide aménagée avec un lit et du mobilier, donnant un côté backroom. Il y a du style, oui, mais est-ce que cela fait sens ? L’utilisation de la créature du coucou et à mettre en relation avec la famille reconstituée de Gretchen, j’imagine, comme une représentation allégorique, mais que faisons-nous de ça ?
Je vais quand même retenir du film ses séquences de peur qui étaient cools. Elles s’inscrivent dans des esthétiques de grands maîtres comme Lynch ou Kubrick mais en se les réapproprient de façon intéressante. Les musiques, la prestation de Hunter Schafer, les thématiques comme le deuil, la recherche de soi et de son identité (la rencontre amoureuse de Gretchen à l’hôtel), l’équilibre familial sont tant de choses qui font que ce film mérite d’être vu !